L’Apocalypse des ducs de Savoie, entre Westminster et Naples (El Escorial, Biblioteca Laurentina, MS E Vitr. V)

Deuxième conférence donnée par Laurence Rivière-Ciavaldini dans le cadre du séminaire 2019-2020 de peinture et conservation-restauration du patrimoine mobilier (HAAR-B5270) du Master en histoire de l’art et archéologie de l’Université Libre de Bruxelles.

Après l’approche générale donnée lors de la première conférence du séminaire, une étude approfondie de l’un des plus célèbres manuscrits de la bibliothèque de Savoie est proposée : l’Apocalypse des ducs de Savoie est un manuscrit réalisé en deux campagnes au cours du XVe siècle, par trois artistes d’origine différentes s’inspirant de modèles hérités d’Angleterre et d’Italie méridionale : Jean Bapteur de Fribourg (en Suisse actuelle), aidé de son compagnon Péronet Lamy originaire de Saint-Claude dans le Jura ont travaillé à l’Apocalypse entre 1428 et 1434 en s’appuyant sur un modèle de la célèbre tradition iconographique anglaise du XIIIe siècle. A la demande de son commanditaire, le duc Amédée VIII (139-1451), le manuscrit encore inachevé fut relié en 1435 afin qu’il puisse l’emporter dans sa retraite de Ripaille sur les bords du lac Léman, où il avait décidé de se retirer du monde en compagnie de six chevaliers ermites. Le manuscrit fut achevé entre 1486 et 1490, par le peintre français, Jean Colombe de Bourges, lequel s’inspira et transforma un prestigieux et mystérieux modèle napolitain probablement conçu pour le roi Robert d’Anjou ou son entourage, vers 1330, à la cour de Naples. Une attention particulière accordée à la portée spirituelle et politique de cette commande prestigieuse laquelle permet de sonder en profondeur l’évolution de l’attente eschatologique des princes savoyards au cours du XVe siècle.